1. En quoi la retraite peut être différente pour les femmes?
Le débat sur les inégalités de revenus entre les hommes et les femmes est régulièrement ramené dans la sphère publique. Mais selon certaines statistiques de la Banque Nationale datant de 2018, la capacité d’épargne entre hommes et femmes peut aller au-delà des inégalités salariales :
- Selon certaines statistiques, les femmes seraient moins bien préparées que les hommes à la retraite, alors que 60 % d’entre elles craignent de manquer d’argent.
- En 2018, 50 % des femmes confiaient la planification de leur retraite à leur conjoint, un pourcentage qui grimpe à 61 % chez celles nées entre 1980 et 2000. Pourtant, les statistiques indiquent que 50 % d’entre elles vivront une séparation au cours de leur vie.
- En moyenne, les femmes vivent environ 4 à 5 ans de plus que les hommes. Il leur faut donc épargner davantage pour financer ces années supplémentaires.
« Prenons le cas d’un homme et d’une femme, tous deux âgés de 65 ans et à salaire égal. Il y a de grandes chances que l’homme ait pu épargner plus d’argent que la femme en prévision de la retraite, car il est resté sur le marché du travail quatre ou cinq ans de plus qu’elle au final. On peut penser au congé de maternité. Ce qu’on remarque, c’est que cet écart risque de s’adoucir auprès des générations plus jeunes, car le congé parental et la contribution à la cellule familiale ont tendance à se faire plus équitablement. Les femmes peuvent également revenir plus rapidement sur le marché du travail, si elles le souhaitent. Par contre, leur espérance de vie ne diminue pas, au contraire. Aujourd’hui, une femme sur cinq a des chances de vivre jusqu’à 96 ans. Il faut donc planifier sa retraite en gardant ces chiffres en tête. » Voilà ce qu’explique Mélanie Beauvais, conseillère principale, centre d’expertise planification financière, Gestion privée 1859.
2. Quels sont les facteurs à considérer pour planifier une retraite?
Bâtir un plan de retraite va bien au-delà d’une épargne mensuelle. Il s’agit de faire un plan global avec un professionnel, en tenant compte de votre situation et de vos objectifs. Afin d’établir le bon plan pour vous, vous devez aussi considérer ces cinq facteurs :
- Le temps : serez-vous à la retraite dans 20 ou 40 ans? Et pendant combien d’années? Aujourd’hui, une femme canadienne de 60 ans vit en moyenne jusqu’à 91 ans. Il est très possible que dans 50 ans, cette espérance de vie continue d’augmenter. Vous devez penser à épargner en conséquence.
- L’inflation : elle a un impact direct sur votre pouvoir d’achat. Par exemple, le voyage que vous voulez faire dans 10 ou 15 ans vous coûtera beaucoup plus cher que si vous le faisiez demain matin. Il vous faut donc économiser plus.
- Les soins de santé : si, à la retraite, certaines dépenses diminuent ou disparaissent complètement (cotisations au REER et au CELI, cotisations aux rentes, charges sociales, remboursement de l’hypothèque, etc.), d’autres dépenses peuvent apparaître (aide ménagère, aide au transport, soins de santé à la maison, etc.). Ne sous-évaluez pas vos dépenses à la retraite.
- La répartition des actifs : plus vous diversifiez vos placements, plus vous diminuez votre risque. Le REER est un outil financier qui est utilisé dans l’élaboration de votre plan de retraite. Le CELI est tout aussi important et peut être avantageux si vos revenus sont moins élevés.
- La cadence des retraits : comment maintenir un certain train de vie sans trop dépenser ni vous priver? Devriez-vous décaisser en premier votre CELI, votre REER ou votre argent comptant? Libérez-vous l’esprit en mettant en place une stratégie incluant la vitesse et la fréquence auxquelles vous dépenserez vos revenus à la retraite.
3. Comment budgéter une retraite?
Penser à son budget de retraite peut paraître ardu ou compliqué, mais avec les bons outils et le bon accompagnement, vous verrez que cela devient facile. De plus, cette étape est essentielle pour avoir une vision claire de vos dépenses et prendre de meilleures décisions. La calculatrice budgétaire du gouvernement du Canada est un outil facile d’utilisation.
Les principales sources de revenus à la retraite sont :
- Les régimes gouvernementaux
Au Québec, c’est le Régime de rentes du Québec (RRQ) qui assure aux Québécoises un revenu de base à la retraite. Si vous résidez à l’extérieur du Québec, on parle du Régime de pensions du Canada, auquel s’ajoute la pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) au niveau fédéral.
Notez également qu’en repoussant, de quelques années, votre demande au RRQ, vous toucherez des montants plus élevés. Si vous reportez votre demande à 70 ans, vous pourriez toucher l’équivalent d’une bonification de 42 %. Par contre, si vous faites votre demande à 60 ans, vous pourriez subir une perte équivalant à 36 %.
- Les régimes complémentaires de retraite (RCR)
Ce sont des régimes offerts par votre employeur (fonds de pension), dans lesquels ce dernier cotise pour assurer un revenu de retraite à ses employés. Mais encore là, il faut bien en connaître le fonctionnement. Posez-vous ces quelques questions : Est-il à prestations déterminées ou cotisations déterminées? Est-il indexé ou non? Y êtes-vous admissible?
- L’épargne personnelle
Ce sont vos placements (enregistrés ou non), vos investissements en immobilier, etc. Ils vous permettent de compléter vos revenus provenant des régimes publics.
« On me demande parfois par où commencer si on a un montant d’argent important à investir, une somme reçue en héritage, par exemple. L’épargne retraite doit toujours demeurer une priorité, certes. Mais si vous avez des dettes qui vous coûtent cher, c’est-à-dire des dettes dont le taux d’intérêt est élevé et dont les intérêts sont non déductibles, remboursez-les en priorité. Je pense par exemple aux soldes de carte de crédit », rappelle Mélanie Beauvais.
4. Est-ce que je recevrai assez du gouvernement lors de ma retraite?
« Il ne faut pas se fier qu’aux prestations gouvernementales pour avoir une retraite sereine, avance l’experte. Le montant d’argent que l’on reçoit du gouvernement varie d’une personne à l’autre. D’une part, vous avez la pension de la Sécurité de la vieillesse. Il s’agit d’un montant fixe pour tout le monde, indexé tous les trois mois. D’autre part, il y a les rentes auxquelles vous avez contribué au long de votre vie professionnelle. Ce qu’on remarque toutefois, c’est que les femmes ne génèrent pas le montant maximal possible – du moins, plus rarement que les hommes. Cela démontre qu’un plus grand effort est demandé chez la gent féminine. Et le revenu à combler est considérable. Pour obtenir un aperçu de vos revenus à la retraite, je vous invite à consulter l’outil SimulRetraite du gouvernement du Québec. »
5. Y a-t-il des différences entre une retraite à deux ou en solo?
« Statistiquement, les femmes ont parfois tendance à se fier à leur conjoint pour la gestion de la planification financière. Par contre, on voit que les femmes sont de plus en plus informées en matière de littératie financière, ce qui est très encourageant », ajoute Mélanie Beauvais.
« La pension de la Sécurité de la vieillesse et les rentes sont individuelles, oui. Mais les couples bénéficient de plusieurs avantages fiscaux dont les retraités vivant seuls ne peuvent se prévaloir, nuance l’experte. L’état civil peut avoir un impact dans la planification de la retraite. lI peut y avoir des arrangements permettant d’économiser de l’impôt dans un couple et au niveau des dépenses courantes. »
« Entre conjoints, vous pourriez transférer une partie de vos pensions de retraite au profit de celui qui a des revenus moins élevés. Cela vous permettra à tous les deux d’économiser de l’impôt. C’est ce qu’on appelle le fractionnement du revenu. »
« Les retraitées célibataires ont donc tout intérêt à rencontrer un conseiller financier en amont. En assumant le plein contrôle de vos finances, vous faites le premier pas vers une retraite plus sereine. »
6. Comment prendre le contrôle de votre retraite?
Même si la retraite est encore loin pour vous, il est important de vous informer et de commencer à la planifier le plus tôt possible. Aussi, il n’est jamais trop tôt ni trop tard pour établir un plan et vous faire accompagner.
« Commencez par faire le tour du propriétaire, suggère Mélanie Beauvais. Rassemblez vos documents, faites votre bilan financier, déterminez vos objectifs de retraite et voyez grosso modo où vous en êtes par rapport à l’épargne. Surtout, allez chercher de l’aide. Vous avez tout intérêt à parler avec un conseiller financier. N’ayez pas peur de poser des questions. Peu importe la taille de votre patrimoine ou la nature de vos questions financières, nous sommes là pour vous aider. »